
Extraits de
Éditions Gallimard (1992)
« Le Très-Bas »
L’amour est l’éveil chaque fois réinventé, chaque fois une première fois. Le monde n’imagine pas d’autre fin que la mort, cette extase du sommeil, et il considère tout à partir de cette fin.
Les premières fois – premiers pas, premier sourire, première larme – sont vus par le monde comme devant nécessairement conduire à une seconde fois plus facile que la première, plus aisée car plus machinale, et la seconde fois mènera à une troisième encore plus facile, déjà somnambule, et ainsi, par lente dégradation, nécessaire usure, on ira jusqu’à la dernière fois – dernier bâillement, dernière langueur de tout.
L’enfant va à l’adulte et l’adulte va à sa mort. Voilà la thèse du monde. Voilà sa pensée misérable du vivant: une lueur qui tremble en son aurore et ne sait plus que décliner. C’est cette thèse qu’il te faut renverser. Partir une deuxième fois et que cette fois soit plus neuve encore que la première, plus radicalement neuve, plus amoureusement neuve.
____________________
© Christian Bobin | ChristianBobin.fr
LE TRÈS-BAS (1992)
Chères lectrices, chers lecteurs, Prenez avis que ce texte a été publié pour l’intérêt informatif qu’il représente en lien avec le thème abordé sur ce blogue. Bien que je sois vigilante quant à la crédibilité de sa source, votre discernement doit prévaloir en tout temps. Utilisez-le. Votre hôtesse, Andree Boulay.
